Le stage fut encadré par Nicolas Ladron de Guevara sensei, épaulé par Michel Dupont sensei. Lors du début du stage, il fut annoncé, sans surprise, que peu de flèches seraient tirées lors de ce stage : arrivé à ce niveau, je pense qu’il est évident pour les participants que les occasions de tirer des flèches sont ailleurs, qui en pratique régulière, qui en taikai. L’occasion d’un stage est surtout l’occasion d’aborder des points théoriques et pratiques qu’on n’a pas l’opportunité de voir en conditions habituelles.
Le stage fut inauguré par un yawatashi, avec :
En tant qu’ite : Nicolas Ladron de Guevara sensei
Dans la fonction de daichikaizoe : Loïc Kerisit godan
Dans la fonction de dainikaizoe : Anne-Sophie Kerisit sandan
L’énergie des participants du yawatashi donnerait le ton pour le reste de la journée. Il y eut peu de commentaires sur le yawatashi, sinon sur des points de détails bien précis, signifiant que l’ensemble du sharei offrait ce qu’on était en droit d’en attendre, c’est-à-dire insuffler une énergie et une atmosphère propices au reste de la journée.
Le yawatashi fut suivi par de la lecture. Quelques mois avant, lors du stage d’Orsay, Claude Luzet sensei avait encouragé à lire les documents « Brève analyse de l’examen régulier » issus de la revue de l’ANKF, à propos des commentaires des hauts gradés sur ce qu’ils sont vu lors d’examens de haut niveau. Ce sont ces documents, et ce qu’en ont sortis nos sensei, qui ont servi de base pour la suite du stage. Nicolas sensei et Michel sensei, entre autres, ont commenté sur l’effet qu’a eu cette publication sur la façon dont ils pratiquent et font pratiquer le kyudo (le terme « effet d’une bombe » a été évoqué à plusieurs reprises). Ces documents sont riches, aussi je ne reprends ici que les principaux points clefs évoqués lors du stage:
Émotions, à ressentir et à faire ressentir
Shahô shagi no kihon
Kihon Takei
Shinki no antei
Kai, tsumeai et nobiai
Seikitai, shikitai
Tateyoko jûmonji
Goju Jûmonji
Tous ces points, qui revenaient dans tous les commentaires des hauts gradés et eu égard à la déception engendrée par leur absence observée lors d’examens, doivent faire l’objet d’une prise de conscience. Et c’est là que s’articule le reste de la journée : pratiquer, observer, critiquer non seulement sa propre pratique mais envers ceux à qui on enseigne, selon ces points clefs.
La question soulevée par ces points est : si l’on n’est pas capable de montrer cela lors d’un examen, lorsqu’on a fait parfois des milliers de kilomètres pour montrer son tir, à quoi bon ? Et tout au long de ces questionnements, Michel sensei rappelle à juste titre que le kyudo est un budo : si l’on ne va pas au tir avec un mental combattif, on ne pratique pas un budo.
Tous ces points d’attention, furent des points recommandés pour la suite de la matinée qui s’est poursuivie par des mochi-mato sharei des godan et yondan en condition d’examens, suivi par des tachi de shinsa pour les sandan. Les commentaires qui ont suivi ces tirs insistèrent sur l’importance d’omae et du rythme qu’il impose, ou mieux, avec lequel il entraîne son tachi ou son sharei.
L’importance du regard et de metsukai fut mentionnée : les yeux sont le reflet de l’âme, des yeux qui ne peuvent pas se fixer trahissent un esprit inquiet. En lien avec le mental combattif, il est important de montrer que l’on a envie de faire un sharei : y aller à reculons n’est pas vraiment le meilleur moyen de montrer qu’on peut faire un tir en harmonie avec les autres tireurs. Globalement, le tir est le résultat de la volonté qu’on a de montrer un beau tir, et pour ça il faut « vouloir y aller » pour reprendre les termes de Michel Dupont sensei.
La matinée fut brièvement interrompue par Claude Luzet sensei qui, prompt et diligent (et ne voulant probablement pas encombrer sa maison avec plus de papier que nécessaire), avait trié les diplômes de shinsa vidéo 2022 sitôt reçus et venait les remettre aux dojos ou CTK pour remettre à qui de droit. Après une pause déjeuner relativement courte, le début de l’après-midi fut consacré à l’étude de points particuliers de l’ouvrage « My Kyudo » écrit (et filmé puisqu’assortis de vidéos) par Takeshi Shibata sensei. Ces points portaient sur les derniers hassetsu, grosso modo à partir d’hikiwake. Il est difficile à ce stade pour moi de privilégier un point plus qu’un autre, aussi je m’en remettrai plus aux impressions que m’ont évoqué le format de l’ouvrage et les sujets abordés : c’est riche, très riche, et un complément qu’on pourrait considérer quasi indispensable au manuel de Kyudo. Ce que le manuel ne peut pas montrer car étant un support papier, l’ouvrage de Shibata sensei permet de l’illustrer en vidéo ou en de (nombreuses !) images. Les points techniques qui ne sont pas fondamentaux (car déjà abordés par le manuel) mais importants tout de même sont aussi évoqués par cet ouvrage. Il est à parier que nombreux sont ce qui au sortir de ce stage cherchent en ce moment à acquérir ce document.
Sur ces entrefaites vint le temps de la mise en pratique : tir corrigé, une flèche, jusqu’au milieu de l’après-midi. Point toujours appréciable quand il y a des pratiquants d’expérience : le yatori était fluide. Après cela, pour permettre aux futurs examinés (examens de Noisiel en août 2023) de s’habituer aux lieux, nos sensei proposèrent de réaliser des entrées d’omae, sous forme de file d’attente : l’occasion de faire plusieurs entrées et de corriger personne par personne. Un point de correction fréquent fut de faire attention à faire un petit pas en tournant afin de garder le rythme et permettre au reste du tachi de rester dans l’harmonie.
Le stage fut suivi par un hitotsumato sharei au féminin par Michiko Iwata godan, Nadine Meyer yondan et Anne-Sophie Kerisit sandan. Simplement rédiger quelques mots sur ce sharei ne ferait pas honneur à l’impression qui se dégageait lorsque j’assistai à ce sharei : j’ai rarement, si jamais, vu un hitotsumato sharei avec autant d’harmonie. Pour reprendre les mots de Nicolas sensei, même si les flèches n’ont pas touché les cibles, le tir a touché nos cœurs.
Il fut décidé de terminer le stage sur cette note ô combien agréable et positive.
Samuel Colin
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